Vis ma vie de rédacteur de PV

Assister à trois réunions d’IRP par semaine, c’est mon métier. On m’appelle tantôt « le rédacteur », tantôt « Monsieur AB Report », souvent « sténotypiste » et parfois même « preneur de son » – malgré mon bac+5, mon esprit de synthèse et ma connaissance des relations sociales. Pendant la réunion, j’analyse, j’appréhende le contexte de l’entreprise, j’évalue les enjeux, je dissèque et réorganise les propos, je trie et classe les idées. Quand vient la fin de la réunion, je m’efface discrètement… Pour m’en aller rédiger votre PV.

Assister à trois réunions d’IRP par semaine, c’est mon métier. On m’appelle tantôt « le rédacteur de PV », tantôt « Monsieur AB Report », souvent « sténotypiste » et  parfois même « preneur de son » malgré mon bac+5, mon esprit de synthèse et ma connaissance des relations sociales. Pendant la réunion, j’analyse, j’appréhende le contexte de l’entreprise, j’évalue les enjeux, je dissèque et réorganise les propos, je trie et classe les idées. Quand vient la fin de la réunion, je m’efface discrètement… Pour m’en aller rédiger votre PV.

Vendredi après-midi

Mon responsable m’envoie mon programme de la semaine à venir : un CSE, une CSSCT et un CSE Central. Trois instances différentes, dans trois secteurs d’activité bien distincts, c’est pas toujours facile, malgré des problématiques souvent communes : réorganisations, orientations stratégiques, GPEC, RPS, etc.

Lundi, 9 heures 15

J’attaque ma semaine par une CSSCT extraordinaire : réorganisation de service d’un hôpital qui vient de fusionner avec un autre établissement. De nombreux changements sont à l’œuvre, le dossier est complexe, le débat est tendu. Certains élus évoquent même des difficultés individuelles sans aucune relation directe avec le point à l’ordre du jour. De mon côté, la prise de notes devient difficile ; je dois faire un sérieux  tri, ne retenir que les informations essentielles, tout en prenant soin de restituer l’ambiance des débats. La discussion devient quasi-collective, et voilà en plus que les sigles débarquent gaiement. ASH ! IBODE ! IADE ! AES ! EI ! CLCC ! J’avoue qu’au début j’étais un peu perdu, mais plusieurs années de rédaction pour cette instance ont fait de moi un véritable pro de l’acronyme.   

Mardi, 14 heures

Direction le 8e arrondissement de Paris pour le CSE d’une banque. A l’ordre du jour, consultation sur les orientations stratégiques et présentation des comptes annuels. Chouette ! Le Secrétaire me remet en réunion les tableaux qui seront étudiés en séance. Une vraie aide pour suivre les débats, même si j’aurais préféré avoir les documents en amont, comme tous les autres élus. Après tout, j’ai quand même la responsabilité de rédiger le PV, qui doit être explicite et sans ambiguïté. Pendant la séance,  interdiction pour moi de relâcher ma vigilance – dans cette instance, les débats ne sont pas enregistrés et je dois bien avouer que le Directeur financier, quoique passionné et généreux en anecdotes chiffrées, n’est pas toujours facile à suivre. 

Mercredi, au bureau

Aucune réunion sur site aujourd’hui. J’attaque la rédaction des PV. Celui de la CSSCT de l’hôpital exige la réécoute de longs passages de l’enregistrement, afin de démêler les tenants et aboutissants de la réorganisation et de clarifier des débats parfois confus. Même si j’ai pris de bonnes notes pendant la réunion (j’ai réussi à rédiger deux points de l’ordre du jour en direct !), la réécoute de la bande se révèle ardue, les discussions collectives rendant certaines interventions difficilement audibles. Et j’avoue que réécouter trois, quatre fois le même passage n’est pas la partie que je préfère de mon métier.

La réunion du CSE de la banque était quant à elle sans enregistrement. Cette prise de notes m’a demandé une concentration extrême et une capacité d’analyse ultrarapide pendant la séance. Un exercice parfois stressant, certains sujets pouvant être techniques et le discours un brin jargonneux. Côté rédaction du PV, la phase d’écriture est en revanche plus rapide : je me concentre sur la remise en forme et la réécriture de mes notes, vérifiant au passage sur Internet quelques notions comptables que je n’ai pas comprises en séance. Mon objectif : rendre le PV le plus clair possible, pour le lecteur final.

Jeudi, 8 heures 30

Troisième et dernière réunion de la semaine : Après un métro, un RER et un bus, j’arrive enfin sur place pour une réunion extraordinaire d’un CSE Central d’un équipementier automobile. L’instance fait appel pour la première fois aux services d’un prestataire extérieur, pour l’accompagner tout à long d’un PSE. Accueilli par le Secrétaire, je prends place dans la salle et commence à établir mon plan de table au fur et à mesure de l’arrivée des participants. Indispensable pour savoir qui parle et attribuer aux bonnes personnes les bons propos. Mais pas de chance, la plupart des élus ressortent chercher un café. A leur retour, c’est le coup classique : ils changent de place dans un jeu de chaises musicales, m’obligeant à refaire mon plan de table, alors que le Président de l’instance ne souhaite pas attendre pour ouvrir la séance. Ne pas paniquer ; j’ai l’habitude. Le Secrétaire est prévenant ; il m’indique que la séance risque d’être agitée. Les élus sont remontés contre la Direction à cause du PSE. Je devrai toutefois conserver une position de neutralité, mon PV devant retracer les débats sans le moindre parti-pris.

La suspension de séance est la bienvenue. Après trois heures de prise de notes intensive et d’une grosse concentration, je suis vidé. Ça tombe bien, il reste encore un peu de café. Certains élus viennent m’interroger sur les procédures du PSE. Même si j’aimerais bien faire une pause, je suis content de partager mon expertise des relations sociales (en plus, j’assure car je viens de suivre une formation sur le sujet).

Vendredi, 9 heures 30

Dernière journée de la semaine. Je suis en rédaction et décide de travailler depuis chez moi. J’ai un extrait de PV à rédiger en urgence pour un client et je ne veux pas perdre de temps dans les transports.  

Dans l’après-midi, je reçois mon planning pour la semaine à venir. Trois réunions à couvrir : une mutuelle, une société d’assurance et à nouveau un CSE Central extraordinaire de mon équipementier automobile préféré, qui poursuit son PSE. C’est reparti pour une semaine chargée, mais à coup sûr intéressante.

Article rédigé par Emmanuel Villin et Arthur Georges